Dr Mourad GOUMIRI
L’annonce faite par le Premier ministre d’amender la loi 90-10, qui date de 1990, faut-il le rappeler, est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle selon les amendements qui seront proposés. En effet, jusqu’au jour d’aujourd’hui, tous les amendements pratiqués l’ont été pour diminuer les pouvoirs monétaires de la Banque d’Algérie au profit du ministère des finances, ce qui revient à dire que le pouvoir exécutif s’est accaparé du pouvoir monétaire, ce qui n’est pas une bonne nouvelle pour la séparation des pouvoir et pour la mise en œuvre des réformes économiques notamment celles monétaires. La question lancinante demeure toujours la même, à travers le temps, à savoir l’indépendance relative du pouvoir monétaire, du pouvoir exécutif et les mécanismes et les instruments de régulation qui doivent structurer les relations entre les deux pouvoirs. Souvenons-nous, que l’amendement le plus emblématique, fut celui d’abroger le mandat de cinq ans (renouvelable une fois), du gouverneur et de celui des membres du Conseil National de la Monnaie et du Crédit, ce qui les réduisait à de simples hauts fonctionnaires, amovibles au gré du pouvoir exécutif (Décret présidentiel) et de sa politique monétaire. Le deuxième amendement qui a achevé l’indépendance du pouvoir monétaire, c’est la relation contractuelle codifiée dans la loi, entre le Trésor public et la Banque d’Algérie, puisque le Trésor public pouvait imprimer autant de signes monétaires en fonction de ses besoins sans que l’institut d’émission, ne puisse « calmer ses ardeurs ». Tous les autres amendements iront dans le même sens de l’inféodation de la Banque d’Algérie au ministère des finances et notamment après le scandale financier majeur subséquent à la création énigmatique de la « banque Khalifa » et des autres banques privées nationales.
La question est donc de savoir si les amendements proposés iront vers plus d’autonomie de la Banque d’Algérie, en lui restituant ses pouvoirs originels, inscrits dans la loi ou, à l’inverse, allons-nous assister à une inféodation totale de cette dernière au ministère des finances, ce qui signifie la mort clinique du pouvoir monétaire ? Dans l’état actuel des choses, il est difficile de tenter un pronostique, tant les protagonistes sont partagés, ce qui n’est pas propre à notre pays, puisque le débat est mondial en fonction des écoles de pensées, monétaristes ou keynésiennes, ou celles qui prônent un « juste milieux théorique » entre les deux écoles, ce qui est à priori impossible à concevoir. Pour le reste des « amendements », il s’agit plus de mettre en œuvre, des textes réglementaires, qui n’ont jamais encore été publiés et de compléter une réglementation qui introduit des technologies financières nouvelles dans le domaine de la monétique. Le sujet est sensible même s’il n’est pas très clair pour le néophyte, qui peut penser qu’il s’agît uniquement d’un problème technique ! Le dossier est éminemment politique et aucune réforme sérieuse du système monétaire et financier ne peut être envisageable sans que des arbitrages soient pris, on n’en veut pour preuve, les retards abyssaux pris par le secteur et son maintien dans un archaïsme moyenâgeux.
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