La définition du pouvoir dans un pays se construit autour de ses institutions et notamment les pouvoir exécutif, législatif et judiciaire qui doivent être séparés pour être reconnus comme démocratique ! Mais peu de penseurs n’intègrent le pouvoir monétaire comme quatrième pouvoir dans cette définition. En effet, la question qui se pose, est de savoir si le pouvoir monétaire doit être autonome ou être sous la tutelle du pouvoir exécutif, législatif ou judiciaire, ce qui entamerait son indépendance ? C’est l’enjeu de l’amendement de la loi 90-10, qui est en débat auprès des deux chambres parlementaires. Les échos obtenus nous font part d’amendements marginaux et ne touchent pas à l’équilibre actuel de la loi. En effet, jusqu’à présent, tous les amendements apportés à la loi, l’ont été pour diminuer les pouvoirs monétaires de la Banque d’Algérie au profit du ministère des finances, ce qui revient à dire que le pouvoir exécutif s’est accaparé du pouvoir monétaire, ce qui n’est pas une bonne nouvelle pour la séparation des pouvoir et pour la mise en œuvre des réformes économiques notamment celles monétaires. La question lancinante demeure toujours la même, à travers le temps, à savoir l’indépendance relative du pouvoir monétaire, du pouvoir exécutif et les mécanismes et les instruments de régulation qui doivent structurer les relations entre les deux pouvoirs.
Les amendements de1994, ont abrogé le mandat de cinq ans (renouvelable une fois), du gouverneur et de celui des membres du Conseil National de la Monnaie et du Crédit, ce qui les réduisait à de simples hauts fonctionnaires, amovibles au gré du pouvoir exécutif (Décret présidentiel) et de sa politique monétaire. Le deuxième amendement, qui a achevé l’indépendance du pouvoir monétaire, c’est la relation contractuelle codifiée dans la loi, entre le Trésor public et la Banque d’Algérie. Dès lors, le Trésor public pouvait s’endetter sans limites auprès de la Banque d’Algérie en fonction de ses besoins sans que l’institut d’émission, ne puisse le recadrer dans sa politique budgétaire. Tous les autres amendements iront dans le sens de l’inféodation de la Banque d’Algérie au ministère des finances et notamment après le scandale financier majeur subséquent à la création énigmatique de la « banque Khalifa » et des autres banques privées nationales. La question est donc de savoir si les amendements proposés iront vers plus d’autonomie de la Banque d’Algérie, en lui restituant ses pouvoirs originels, inscrits dans la loi 90-10 ou allons-nous assister à une reconduction de la situation antérieure ce qui signifie la mort clinique du pouvoir monétaire ?
Dans l’état actuel des choses, ces amendements portent sur des éléments techniques (banques islamiques, monnaies numériques, ouverture de banque à l’étranger et autres instruments monétiques) sans remettre en cause les équilibres actuels. s’agissant d’un débat mondial lié aux écoles de pensées (monétaristes ou keynésiennes) ou celles qui prônent un « juste milieux théorique » entre les deux écoles. Le sujet est sensible même s’il n’est pas très clair pour le néophyte, qui peut penser qu’il s’agît uniquement d’un problème technique car il est en fait d’ordre politique et de distribution des pouvoirs entre différentes institutions ou le concentrer entre une seule. Pour le reste des « amendements », il s’agit plus de mettre en œuvre, des textes réglementaires, qui n’ont jamais encore été publiés depuis 1990 et de compléter une réglementation qui introduit des technologies financières nouvelles dans le domaine de la monétique. Les deux « blagues » qui circulent sont l’ouverture de « bureaux de change » privés et le changement des billets pour combattre la thésaurisation. Pour la première, elle ne prend pas en ligne de compte que dans chaque banque publique et privée, il existe un guichet de change et que l’ouverture éventuelle de bureaux de change privés ne signifie en aucun cas la possibilité de convertir des dinars en devises, ce qui rend ce service inutile actuellement en attendant la convertibilité totale du dinar, qui n’est pas d’actualité. La seconde est liée à un changement des billets de banque, qui nous rappelle l’opération catastrophique qui a eu lieu lors du retrait de la coupure de 500 Dinar en 1983 et qui s’est soldée par le remboursement des personnes qui n’ont pas pu faire l’opération. La révision de la loi 90-10 ne sera pas celle d’une rupture avec les pratiques anciennes mais un simple « rafraichissement » du texte pour l’adapter à un nouveau contexte.
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