L’inquiétude des parents d’élèves s’exacerbe avec le début des préinscriptions pour l’année scolaire 2020/2021 dans les écoles privées, au moment où un litige les opposant aux gérants de ces établissements concernant le paiement des frais de scolarité du 3e trimestre de 2019/2020 tarde à connaitre son épilogue.
En effet, depuis l’arrêt des cours, le 12 mars dernier à cause du coronavirus, un véritable bras de fer est engagé entre les parents d’élèves et les gérants des écoles privées concernant le paiement des frais de scolarité au titre du 3em trimestre.
Si les directions de ces écoles privées sont catégoriques quant à « l’obligation » du payement des frais pour « faire face aux charges de fonctionnement », les parents, pour leur part, ne voient pas pourquoi devraient-ils payer pour une prestation qu’ils n’ont pas eue. Une situation jugée, du reste, « inextricable » causée par la pandémie du Covid-19.
Ni la loi n 08-04 du 15 Moharam 1429 correspondant au 23 janvier 2008 portant loi d’orientation sur l’éducation nationale, ni l’ordonnance n 05-07 du 23 août 2005 fixant les règles régissant l’enseignement dans les établissements privés d’éducation et d’enseignement, n’ont prévu ce genre de situation. L’article 65 de la loi d’orientation sur l’éducation nationale se contente de stipuler que « le ministre chargé de l’Education nationale exerce le contrôle pédagogique et administratif sur les établissements privés d’éducation et d’enseignement de la même manière qu’il l’exerce sur les établissements publics ».
En attente d’un « arbitrage » du ministère, les familles s’estiment « victimes » d’une situation « inédite » (Covid-19) qui a touché toutes les couches de la société. « Mon fils est confiné depuis début mars dernier et la directrice de l’école exige de nous de payer les frais sans prestation en contrepartie. Pis encore, elle menace de ne pas le réinscrire l’année prochaine. La crise a touché tout le monde, pourquoi serions-nous obligés de payer », a déclaré Fatima, secrétaire dans une entreprise privée, en arrêt de travail depuis le début de la crise sanitaire.
Père de deux enfants, Malik se dit conscient que le contrat signé avec l’école privée est annuel et non pas mensuel. Cependant, nul ne pouvait prévoir ce genre de situations, a-t-il souligné, précisant que « les répercussions de la pandémie ont ébranlé pratiquement tous les foyers, et les premiers à en pâtir sont les professions libérales dont les commerçants ».
« Mon commerce est fermé depuis quelques temps. Je suis responsable de ma petite famille, mes parents et mes deux sœurs. Faute de ressources en cette période de confinement, je suis dans l’incapacité de payer l’école, puisant dans mes économies, à peine si j’arrive à subvenir à leurs besoins alimentaires », a-t-il-expliqué.
Même son de cloche chez d’autres parents d’élèves qui appellent le ministre de l’Education à intervenir. Un appel, disent-ils, qui demeure sans écho puisque leurs tentatives de se réunir avec des responsables de ce département pour poser le problème n’ont pu aboutir.
Un autre parent a fait savoir que « les familles qui se comptent par milliers sont très inquiètes quant à la scolarité de leurs enfants surtout que des établissements brandissent la menace de rompre le contrat définitivement et ne pas réinscrire les élèves n’ayant pas payé le 3é trimestre de la discorde ».
De son côté, le président de l’Association nationale des parents d’élèves (ANPE), Khaled Ahmed, s’est dit prêt à faire la « médiation » et transmettre la doléance au ministère de tutelle afin de « trouver une solution consensuelle » à même de satisfaire tout le monde. « Les établissements considèrent que les parents d’élèves ont signé un engagement d’une année et non d’un mois renouvelable, arguant qu’ils ont des charges à payer. Les parents d’élèves ont aussi le droit de ne pas payer, étant donné qu’il n’y a pas eu de troisième trimestre », a expliqué M. Khaled.
Qualifiant la situation de « délicate », la présidente de la Fédération nationale des parents d’élèves (FNPE), Djamila Khiar, a, quant à elle, estimé que seul le ministère de l’Education nationale est habilité à « trouver une solution à ce litige », mettant en avant, également, ce qu’elle a considéré comme étant un « vide juridique ».
Les établissements privées « ne peuvent assumer seuls les charges »Le président de l’Association nationale des écoles privées algériennes (ANEPA), Salim Aït Ameur, a estimé, lui, que les établissements « ne peuvent assumer seuls » les incidences catastrophiques engendrées par le coronavirus.
Il considère cependant que les directeurs de ces établissements devraient s’inscrire en droite ligne des initiatives de solidarité au sein de la société après la propagation du Covid-19, « en faisant l’impasse sur le payement des frais du 3e trimestre notamment par les parents réellement touchés par la crise », faisant appel, dans ce contexte, à l’arbitrage du ministère de l’Education nationale, non sans souligner que les tentatives de son association qui regroupe 200 écoles privées sur les 500 existantes à l’échelle nationale, sont restées « vaines ».
« Ceci dit, certaines écoles ont essayé de trouver un consensus qui n’a pas satisfait la majorité des parents d’élèves. En effet, certains établissements ont suggéré de partager les frais de scolarisation en deux, soit 50% à verser par les parents, alors que d’autres ont proposé que le tiers et certains ont carrément décidé de ne rien percevoir », a-t-il dit.
Dans une note adressée aux directeurs écoles privées, relayée par la presse nationale, la direction de l’Education d’Alger-Ouest a mis en garde ces derniers, en les menaçant de sanctions si des « dépassements » envers les parents d’élèves continuent d’être constatés et avérés. Cette note intervient suite à de nombreuses plaintes de parents d’élèves ayant dénoncé des « pressions » dont ils auraient fait l’objet car ne voulant pas s’acquitter des frais de scolarité du dernier trimestre de l’année en cours.
Toutes les tentatives de l’APS d’avoir les éclaircissements nécessaires sur ce conflit auprès du ministère de l’Education nationale se sont avérés vaines. Pour rappel, les frais de scolarisation par année pour les enfants du cycle primaire varient entre 190 000 DA et 260 000 DA, de 200 000 à 350 000 DA pour les élèves du moyen, et entre 250 et 400 000 DA pour les lycéens.
Selon les statistiques du ministère de tutelle, pour les examens de l’année scolaire 2018/2019, près de 20 000 candidats inscrits à ces examens, étaient scolarisés dans des écoles privées. Ainsi, il a été recensé 9516 candidats pour l’examen de cinquième année, 7299 candidats inscrits à l’épreuve du BEM et 4011 candidats à l’examen du Bac.
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