De mémoire judiciaire, c’est probablement la première fois qu’un haut responsable algérien en fuite à l’étranger, pour échapper à la justice qui l’a condamné, fasse l’objet d’une procédure d’extradition. Il s’agit, en l’occurrence, de l’ancien tout puissant PDG de Sonatrach, Abdelmoumen Ould Kaddour extradé hier vers l’Algérie. La télévision publique a montré des images de l’ancien PDG de Sonatrach, arrivant à l’aéroport d’Alger, habillé en costume bleu, les mains menottés et conduit par deux policiers vers un fourgon cellulaire. Un avocat, interrogé hier par la télévision Enahar a expliqué qu’il existe entre l’Algérie et les Emirats arabes unies une convention d’extradition de ressortissant recherchés par les justices des deux pays qui entretiennent par ailleurs de bonnes relations politiques. C’est donc la fin de la cavale pour le protégé de l’ancien ministre de l’Energie, Chakib Khellil qui, normalement et selon les règles de procédure, se fera signifier les motifs de sa condamnation par le procureur de la République avant sa mise en détention. Cette extradition met fin à une longue fuite de l’ancien PDG de Sonatrach, qui avait précipitamment quitté l’Algérie, au lendemain de son limogeage par l’ex-chef de l’Etat intérimaire, Abdelkader Ben Salah, le 23 avril 2019 pour se rendre à Paris puis à Londres avant de prendre l’avion vers les Emirats où il a ses ronds de serviettes. Abdelmoumen Ould Kaddour a été arrêté à l’aéroport de Dubai en mars dernier au moment où il s’apprêtait à voyager vers Londres, il a été libéré sous caution avec interdiction de quitter le territoire émirati après le retrait de son passeport. Le mandat d’arrêt international a été émis contre Abdelmoumen Ould Kaddour dans le cadre de la fameuse affaire de la raffinerie Augustin dont il était le principal accusé. Cette raffinerie vieille de 70 ans et dont l’acquisition était alors présentée comme un haut fait de gouvernance de Sonatrach par Ould Kaddour, appartenait à la filiale italienne d’ExxonMobil et a coûté bagatelle de 725 millions de dollars. Un prix jugé exorbitant compte tenu de la vétusté des installations ainsi que le caractère déficitaire de l’usine, qui a poussé la compagnie à s’endetter pour un montant de 250 millions de dollars, dont 100 millions de dollars destinés aux travaux de maintenance .Mais Ould Kaddour est également poursuivi dans le dossier de Sonatrache 2, avant même sa nomination à la tête de Sonatrach et cela pour passation de marchés de gré à gré octroyés dans des conditions suspectes ainsi que des soupçons de surfacturation astronomique relevées par l’IGF dans la gestion de BRC, la fameuse joint-venture entre Sonatrach et la compagnie américaine Halliburton. Cette extradition de Ould Kaddour marque probablement un tournant dans les affaires de corruption liées à la Sonatrach, dans lesquelles d’autres ex-responsables, dont l’ancien ministre de l’Energie Chakib Khellil, sont impliqués et font l’objet d’un mandat d’arrêt international.