Selon le rapport du FMI d’ avril 2023, dans un contexte caractérisé par les perturbations du secteur financier, le niveau élevé de l’inflation, le relèvement des taux d’intérêts des banques centrales, les tensions en Ukraine, en Asie( Taiwan) , l’héritage de trois années de pandémie de COVID-19 et les impacts de l’émergence des BRICS sur la nouvelle reconfiguration géostratégique mondiale , les perspectives de l’économie mondiale sont incertaines. Cela a un impact sur le développement de bon nombre de pays en voie de développement, les pays pauvres mais également des mono exportateurs de matières premières brutes dont ceux dépendant du cours des hydrocarbures .
1.-Sous l’effet des perturbations des chaînes d’approvisionnement et de l’accentuation des tensions géopolitiques, les risques ainsi que les éventuels bienfaits et désavantages de la fragmentation géoéconomique se retrouvent au cœur du débat de politique économique. L’inflation globale mondiale devrait passer de 8,7 % en 2022 à 7 % en 2023 mais pour la plupart des pays, l’inflation ne devrait pas revenir à son niveau d’ avant 2025. Le PIB en 2022 des USA (24796 milliards de dollars , la Chine 18460 milliards de dollars ( 72% du PIB des BRICS) et l’Europe 17180 y compris le Royaume Uni accaparent plus de 60% du PIB mondial estimé à 100.000 milliards de dollars en 2022 alors que le PIB de l’ensemble du continent africain approche les 2980 milliards de dollars, extrapolé en 2027 à 4600 milliards de dollars, sous réserve de l’impulsion de la zone d libre échange et d’une plus forte intégration sous régionales existant des Afriques et non pas une Afrique, ( 11/12% actuellement) , un PIB largement inférieur à celui d’un seul pays l’Allemagne 3867 milliards de dollars , restent donc un long chemin à parcourir D’après les prévisions de référence, la croissance devrait ralentir de 3,4 % en 2022 à 2,8 % en 2023, avant de s’établir à 3,0 % en 2024. Les pays avancés ont eu 2,7% de taux de croissance en 2022 et une prévision de 1,3% en 2023 dont : les USA 3,4% en 2022 et 2,8% en 2023, la zone euro 3,5% en 2022 et 0,8% en 2023 dont les deux locomotives 1,8% en 2022 et négatif en 20323 moins 0,1% pour l’Allemagne et 2,6% en 2022 e t0,7% pour la France. Pour les pays émergents et pays à revenus intermédiaires nous avons 3,9% en 2022 et taux identique en 2023 et les pays en voie de développement 5,0 en 2022 et 4,7% en 2023 et pour les locomotives des pays émergents nous avons la Chine 3,0% en 2022 et 5 ;2% en 2023, mais loin des taux de croissance de 7/8% du passé pour absorber la demande d’emploi du fait de la forte croissance démographique. Pour d’autres pays clefs nous avons : l’Inde 6;8% en 2022 et 5,2% en 2023, la Russie 2 ;1% en 2022 et 0,7% en 2023, le Brésil 2,9% en 2022 e t0,9% en 2023, le Mexique 3 ;1% en 2022 et 1,8% en 2023 , le Nigeria 3,3% en 2022 et 3,2% en 2023 et l’Afrique du Sud 2,0% en 2022 et 0,1% en 2023. Cette situation caractérise le système financier international , avec la faillite de banques américaines spécialisées dans les crypto-monnaies dont la Silicon Valley Bank (SVB), la “banque de la tech” et de Signature Bank, également proche du monde des cryptos. , la faillite du Crédit Suisse, qui compte parmi les 30 plus importantes banques du monde afin d’éviter un impact systémique, la Banque nationale suisse (BNS), ayant accepté de débloquer des liquidités pour 100 milliards de dollars en faveur de Crédit Suisse dans le cadre de l’accord du rachat par UBS fin mars 2023 et récemment de nouveaux scandales financiers touchant cinq établissements bancaires français : la Société générale, BNP Paribas, Natixis, HSBC et Exane, une filière de la BNP Paribas spécialiste des investissements financiers avec une fraude fiscale estimée provisoirement à plus de 150 milliards d’euros , a amplifié l’endettement des Etats sous la pression sociale où le montant total de la dette mondiale publique et privée est estimé en 2022 à environ 300 000 milliards de dollars, contre 226.000 en 2020 un peu moins de la moitié par des dettes d’État,
2.- Le relèvement des taux d ‘intérêts des banques centrales pour juguler l’inflation outre l’effet du risque d’accélérer le ralentissement de l’économie , le renchérissement des prêts, a fait exploser le montant des dettes extérieures de bon nombre de pays en voie de développement. Environ 60 % des pays les plus pauvres sont actuellement exposés à un risque élevé de surendettement ou déjà surendettés, surtout sur le continent Afrique fortement connectée à l’économie mondiale à travers ses importations et ses exportations accentuant la dette où selon le rapport de la Banque mondiale sur la dette extérieure 2022, à fin 2021, le stock de la dette extérieure totale des pays du continent s’est établi à 1074 mds de dollars, dont 790 mds contractés par les pays d’Afrique subsaharienne et 284 mds par les pays africains de la région Mena (Moyen-Orient et Afrique du Nord . Pour le FMI le volume de la dette extérieure des pays à revenu faible et intermédiaire a globalement augmenté de 5,3 % en 2020 pour atteindre 8 700 milliards de dollars et selon la CNUCED, les pays en développement avaient besoin de 310 milliards de dollars pour assurer le service de leur dette publique extérieure en 2022. La Chine était le principal prêteur bilatéral des pays IDA fin 2021 avec 49 % de leur encours de dette bilatérale, contre 18 % en 2010 ce qui explique pour ce pays la réticence de la restructuration de la dette des pays en situation de surendettement, sans un accord global de toutes les institutions internationales. Selon une étude de BSI de 2022, la remontée des taux d’intérêt aux Etats-Unis aurait des répercussions pour les économies émergentes (sorties de capitaux, dépréciation des taux de change, etc.). Toutefois, certains pays semblent plus exposés que d’autres et des pays qui ne parviendront pas à contenir les pressions inflationnistes. Avec des taux d’intérêt réels négatifs pourraient être relativement plus affectés (Turquie, Argentine, Nigeria) et des pays avec des besoins de financement externe élevés seraient plus sensibles au resserrement des conditions de financement (Géorgie, Tunisie, Sénégal, Kazakhstan). Des pays qui dépendent fortement des flux d’investissement volatils (Amérique Latine, Afrique du Sud) et où ces flux constituent une source importante pour alimenter les réserves de change seraient particulièrement vulnérables (Égypte, République Tchèque) et des pays avec des taux de change surévalués (Egypte, Chine, Inde) pourraient également voir leurs devises se déprécier en 2022.
3.- L’annonce du risque d’une récession de l’économie mondiale par le FMI, le poids croissant des BRICS et les tensions actuelles entre la Russie/Ukraine/Occident et les USA/ Chine concernant Taiwan en Asie risquent de bouleverser toute la carte géopolitique du monde. C’est ainsi que le monde devrait connaître un grand bouleversement à travers le poids croissant des BRICS, composés de cinq pays, où le pour 2021, le PIB de la Chine est 18460 milliards de dollars et des réserves change de plus de 3000 milliards de dollars,( plus de 60% des exportations se faisant en 2022 avec les USA et l’Europe environ 12% avec la Russie ) le Brésil, est de 1608 milliards de dollars, la Russie 1750 milliards de dollars , l’Inde 3250 milliards de dollars , l’ Afrique du Sud, 420 milliards de dollars Nous avons au total pour 2021 un PIB des Brics de 25 498 milliards de dollars, la Chine représentant 72,54%, étant largement leader au sein de cette organisation. Au total, les Brics représentent 45% de la population de la planète et près du quart de sa richesse. Paradoxe, ayant été à l’origine de plus de 50% de la croissance économique mondiale au cours des dix dernières années, les Brics sont faiblement représentés dans les organisations internationales, mais devant souligner que si le G7 a une idéologie sensiblement commune, européo centriste, au niveau des BRICS les différentes pays ont des systèmes politiques et socio économiques différents mais avec un objectif commun favoriser le co-développement, se fondant sur le respect du choix souverain du système politique et économique de chaque nation, tenant compte de son histoire et de son anthropologie culturelle. L’action des Brics a permis de soulever des problèmes jusque-là ignorés par les pays développés dans un esprit dépassé de domination, comme le déséquilibre de l’économie mondiale, qu’il ne peut y avoir de développement global sans le développent et de prospérité de la majorité des pays en voie de développement, proposant de créer un partenariat global fondé sur le dialogue productif par une compréhension mutuelle et une coordination des efforts entre le Nord le Sud afin de résoudre les nombreux défis de notre monde. C’est pour échapper à la dépendance de l’hégémonie du dollar qui constitue encore la principale monnaie internationale où selon le FMI le dollar représentait à la fin de 2021 près de 59% des réserves mondiales de change , sa part s’étant tendanciellement depuis 1999, où il représentait 71% des réserves de change mondiales avec une part de l’Euro qui est passée de 19% à 21% durant cette période, que les Brics ont décidé de créer une nouvelle banque de développement avec la nomination récente à la tête de cette banque de l’ancienne présidente du Brésil, montrant son importance et ce à travers la contribution des banques centrales des Brics, une partie des réserves de devises étrangères pourrait être concentrée, de même, par l’émission d’emprunts sur le marché financier international, pour servir au développement des Brics. Avec les nouvelles candidatures 2023 selon la formule proposée par la Chine, le Brics+ incluant environ 12 pays qui ont postulé tant en tant qu’observateur ou membre plein , dont l’Algérie, le Mexique- l’Arabie Saoudite; – l’Argentine – le Nigeria – les Emirats arabes unis – l’Egypte – l’Iran., nous aurons un accroissement de population de 674 millions d’habitants qui s’ajoutent à ceux des Brics et un rajout au PIB de 6551 milliards de dollars passant de 25% en 2022 à environ 30% du PIB mondial. Mais pour l’instant, entre 2022/2023, les USA et l’Europe, y compris la Grande Bretagne, pour moins d’un milliard d’habitants accaparent sur un PIB mondial de 100 000 milliards de dollars en 2022, environ 40% du total (voir notre interview à Radio Algérie Internationale du 21 avril 2023 qui est le prolongement de nos contributions à l’American Herald Tribune USA août 2019, en anglais, l’Algérie face aux les nouveaux enjeux géostratégiques mondiaux et mars 2023 Financial Afrik Paris/ Dakar, l’impact sur les relations internationales des Brics).
4.-Concernant l’impact de la crise mondiale sur le cours des hydrocarbures , l’Algérie dépendante à 98% de ses ressources en devises des hydrocarbures ,y compris les dérivées représentant plus de 60% ,incluses de la rubrique hors hydrocarbures, est attentive à la croissance de l’économie mondiale principal déterminant du cours des hydrocarbures ainsi que du futur modèle de consommation énergétique qui se dessine entre 2023/2030( énergie renouvelables, hydrogène vert). décision récente de certains pays de +d’une réduction d’environ 1.700.000 barils/j y compris la Russie a eu un effet de stabilisation relatif, qui sont des décisions individuelles n’ engageant pas les 23 pays de l’organisation, qui avait atteint le plancher de 70/72 dollars le cours du Brent auparavant. Cependant ,étant illusoire de prévoir un baril à plus de 100 dollars, sauf tensions géostratégiques imprévisibles en 2023 (voir notre interview à la télévision internationale ALG24 15/04/2023) les investisseurs anticipant de nouvelles hausses de taux d’intérêt de la part des banques centrales américaine et de la banque européenne pour combattre l’inflation, une croissance loin des attentes de l’économie chinoise et indienne , ce qui pourrait peser sur la croissance et la demande de brut , le cours ayant fluctué après cette décision entre 82/825 dollars le Brent pour clôturer le 21 avril 2023 ) 81,49 dollars le Brent et à 77,78 dollars le Brent avec un cours euro/ dollar 1,0978, dont l’appréciation récente a eu un impact à la baisse entre 2/3 dollars. Quant au cours du gaz sur le marché libre après avoir été coté au lendemain de la guerre en Ukraine à 250/300 dollars le mégawattheure, la cotation entre mars et avril 2023 fluctue entre 48/55 dollars le mégawattheure ; ainsi le prix du MWh en France sur le marché du PEG est de 43,28 €/MWh en mars 2023, contre 50,678 €/MWh en février 2023, soit une baisse de 14,60%.
En conclusion, selon certains scénarios, nous devrions assister non pas à des conflits mais à une entre les USA et la Chine entre les deux plus grandes puissances économiques mondiales , où le tensions en Ukraine profitent essentiellement à ces deux afin de se partager les zones d’influences et donc une profonde reconfigurations des relations internationales horizon 2025/2030. Concernant l’Algérie, devant être conscient que dans la pratique des affaires n’existent pas de sentiments mais que des intérêts, sa position vis-à-vis des conflits est une position de neutralité . Son adhésion aux BRCS a pour but essentiel de diversifier son économie dépendant en 2022 à plus de 80% de ses recettes en devises de l’Europe essentiellement les hydrocarbures , mais ayant un cadre macro financier relativement positif. L’Algérie n’est pas pénalisée par le relèvement des taux d’intérêt des banques centrales du fait que sa dette extérieure est faible, où selon la Banque d’Algérie, l’encours de la dette extérieure, à fin septembre 2022, exprimé en équivalent dollars US, est estimé à 2,914 milliards de dollars contre 3,062 milliards de dollars à fin décembre 2021, en baisse de 148 millions de dollars. Le taux de croissance a été de 3,7% et extrapolé par le FMI à 2,6% en 2023, étant due à la baisse du cours des hydrocarbures par rapport à l’année 2022 et certainement à la sécheresse qui frappe pas seulement l’Algérie mais l’Afrique du Nord avec une baisse du rendement de l’agriculture , pour le blé des deux greniers de à savoir Tiaret et Sétif. Cette baisse de croissance , mais relativement positive par rapport à bon nombre de pays s’explique par la réduction du cours du pétrole estimée en 2023 entre 80/85 dollars le baril contre 106 dollars en 2022, et 72 dollars en 2021, et 10/12 dollars pour le gaz, le million de BTU contre 15/16 dollars en 2022 et 5/6 en 2021. Si cette tendance se confirme pour l’année 2023, les recettes prévues pour Sonatrach se situeraient entre 50/55 milliards de dollars pour 2023 contre 60 en 2022. Attention à l’illusion de la rente éternelle: une économie diversifiée implique de profondes réformes institutionnelles et macro- et micro économiques ,une nouvelle gouvernance et la valorisation de la richesse la plus sûre le savoir fondement de l’innovation permanente.
Dr. Abderrahmane MEBTOUL
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