Le film documentaire historique « Cayenne, ou l’histoire d’un enfer », du réalisateur Said Oulmi, un rappel douloureux sur le destin des déportés algériens au bagne de Cayenne en Guyane, a été projeté en avant-première, samedi 29 octobre, à Alger à l’occasion du 68e anniversaire du déclenchement de la Guerre de libération nationale.
Projeté à la salle Ibn Khaldoun à Alger, en présence du Conseiller du Président de la République, chargé des Relations extérieures, Abdelhafid Allahoum et des ministres, des Moudjahidines et des Ayants droit, Laïd Rebiga et de la Culture et des Arts, Soraya Mouloudji, ainsi que du réalisateur, « Cayenne, ou l’histoire d’un enfer » fait partie d’une série de quatre documentaires historiques, présentés sous l’intitulé, « Les témoins de la mémoire » et produits par le ministère des Moudjahidines.
Après la fermeture du bagne de la Nouvelle Calédonie en 1897, l’administration coloniale a repris comme destination, la Guyane comme lieu d’éloignement et d’isolement des algériens condamnés arbitrairement et soumis à des mesures punitives abjectes et abominables, « avec entre autre but, d’accaparer leurs terres sans risque d’avoir d’opposants à leur forfaitures » explique l’historien-chercheur, Younès Adli.
L’histoire se répète et donne accès à un autre cauchemar qui commence alors pour les algériens qui y sont envoyés.
Ali Belhoutes, à la silhouette brisée, est l’un de ces rares survivants du bagne de Guyane et témoin vivant de cet enfer. Déporté en 1930 à l’âge de 17 ans, il est retrouvé en 2005, alors qu’il avait atteint les 98 ans, dans sa petite maison entourée d’oliviers dans un village perché dans les montagnes du Djurdjura.
Condamné à dix ans d’emprisonnement, Ali tombe sous le coup de la nouvelle loi du 30 mai 1854 qui stipule que toute individu déporté au bagne, devra purger le double de la peine prononcée à son encontre.
A travers ses souvenirs et son récit poignant, Ali, écorché vif, à la blessure encore ouverte, vivait encore, au moment de son témoignage, le « déchirement d’avoir été arraché à sa terre natale » et envoyé au bout du monde, « entassé avec d’autres déportés dans des cages », à bord du « Bateau Blanc » dans des « conditions de traversée inhumaines ».
Son témoignage a fait plonger l’audience dans l’univers du camp de la mort où furent envoyés près de 20.000 algériens de 1897 à 1952.
Plusieurs historiens, intervenant dans le documentaire, ont été unanimes sur le « traitement inhumain des Bagnards » qualifiant, pour certains, l’horreur et l’atrocité de ces faits historiques avérés de « crimes contres l’humanité ».
Des lieux que le temps a figé, témoins de l’abjection et de l’infamie de l’administration coloniale française, sont également montrés dans le documentaire, à l’instar de « La Forestière » un bagne en plein forêt sauvage où les conditions de détention sont des plus atroces et les travaux forcés des bagnards se limitaient à l’abattage des arbres.
Autres lieux témoins de ces manquements à l’éthique humaine, « Le Camp de la transportation » où les nouveaux arrivés, injustement condamnés, se voient immatriculés pour ne représenter aux yeux de l’administration pénitentiaire que de simples données numériques, ainsi que le « Musée des bagnards », un asile pour les prisonniers internés qui n’auront pas pu supporter leur condition.
Said Oulmi explique que « ce travail est basé sur des faits historiques vérifiables et des personnes ayant réellement existé », précisant que l’approche pour la réalisation de ce documentaire a été basée sur une « vision académique abordant quatre volets essentiels: les lois, les conditions de déportation, le bagne et les conditions de détention ».
Le ministre des Moudjahidines et des Ayants droit a rappelé que ce documentaire intervenait dans le processus de « l’écriture de l’histoire et de la mémoire », avant d’ajouter que le film est venu « révéler le calvaire des exilés algériens, survenu lors des pratiques répressives opérées par le colonisateur pour contrecarrer les offensives de la résistance populaire algérienne ».
APS.
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