Dr Mourad GOUMIRI.
Le mouvement des non-alignés est une organisation internationale regroupant 120 États en 2012 (le siège est à Lusaka en Zambie), 17 États et 9 organisations internationales sont observateurs. Il se définit comme n’étant alignés sur aucune grande puissance mondiale. Le but de l’organisation, contenu dans la « déclaration de La Havane » de 1979, est d’assurer « l’indépendance nationale, la souveraineté, l’intégrité territoriale et la sécurité des pays non alignés et de promouvoir la solidarité entre les peuples du tiers monde ». La déclaration de Brion du 19 juillet 1956, proposée par Gamal Abdel Nasser, Josip Broz Tito, Soekarno et Jawaharlal Nehru, marque l’origine du mouvement, qui vise alors, dans le contexte de la guerre froide, à se protéger de l’influence des États-Unis et de l’URSS qui cherchaient à rallier le monde à leur cause. Le terme de « non-alignement » a été inventé par le Premier ministre indien Nehru lors d’un discours en 1954 à Colombo. On peut considérer que la conférence de Bandung, tenue en 1955, qui a réuni une trentaine de pays d’Afrique et d’Asie, est une étape importante vers la constitution du mouvement des non-alignés. Lors de la conférence d’Alger (5-9 septembre 1973), le mouvement initie un programme intitulé le « Nouvel ordre économique mondial » (NOEI), qui est adopté par consensus lors de l’Assemblée générale des Nations unies le 1er mai 1974. Elle a, par exemple, refusé de suivre les instances du consensus de Washington, lequel regroupe le Fonds monétaire international (FMI), l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et la Banque mondiale, considérant que ce serait nuisible aux intérêts de ses membres.
Le mouvement des non-alignés qui s’est développé dans les années 50, en pleine guerre froide, semble aujourd’hui, avec le conflit ukrainien, renaître avec une certaine acuité. En effet, à peu près les mêmes pays d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie, représentant l’écrasante majorité de la planète, s’abstiennent de prendre une position franche, dans ce conflit en terre européenne, considérant qu’ils ne sont pas directement concernés et qu’il y a un traitement discriminatoire de ce dossier, par rapport aux autres dossiers qui sévissent dans le monde et notamment celui Palestinien. Ce traitement, de « deux poids, deux mesures », étant acté, une « majorité qualitative », dans ces trois continents, souhaite ne pas entrer dans les calculs étroits des puissances du moment, pour éviter de paraître alignés sur l’une ou l’autre des parties, malgré les énormes pressions exercées par chaque camp. Cette situation, déjà usitée durant la guerre froide, que l’on croyait révolue, donne au non alignement toute sa pertinence et sa crédibilité, dans la mesure où, les pays non alignés s’évitent des représailles des deux parties et des sanctions à peines voilées.
Est-il possible d’envisager un regain de vitalité du non-alignement ? Certainement, dans la mesure où, la nouvelle guerre froide s’installe dans la durée et on ne voit pas comment le conflit ukrainien va pouvoir effacer ces traces profondes même après son règlement provisoire ou définitif. Il est donc attendu, des pays membres du mouvement des non-alignés de se concerter pour réinstaller ce mouvement au cœur du concert des nations, afin d’éviter une troisième guerre mondiale fatale à toute l’humanité mais également pour palier à la paralysie de l’appareil onusien, qui s’est montré, encore une fois, incapable d’imposer la paix dans le monde, mission pour laquelle il a été créé, dès la fin de la deuxième guerre mondiale. Un long travail de mobilisation et d’engagement politique devra être déployé pour faire « renaître de ses cendres » le mouvement qui sera soit sabordé par les « superpuissances », soit récupéré par elles afin de servir leurs intérêts. Notre pays a tout intérêt à agir afin que ce mouvement parvienne à s’imposer dans le concert des nations et permette à tous ses pays membres d’échapper aux diktats imposés par les puissances actuelles et celles futures.
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