C’est par une simple lettre, envoyée par le président français Emmanuel Macron au roi du Maroc Mohamed VI et rendue public par la partie marocaine, que le président français reconnaît la « marocanité » du Sahara occidental ! Au-delà de l’aspect protocolaire, cette décision a de quoi surprendre plus d’un, dans la mesure où la France, membre permanent du Conseil de sécurité, s’est toujours alignée sur le droit international.
Les résolutions de l’ONU, sur ce dossier, sont claires, à savoir l’organisation d’un référendum d’autodétermination, sous les auspices de l’ONU, l’envoi d’un représentant personnel, du Secrétaire général de cette organisme et la présence d’une force d’interposition onusienne in situ.
Suite à cette révélation rendue public par le Maroc, l’Algérie a immédiatement rappelé son ambassadeur pour « consultation », ce qui va entraîner une crise (encore une) diplomatique entre les deux pays.
Combien de présidents français se sont rendus en visites officielles en Algérie depuis l’indépendance ? Tous sans exception et à plusieurs reprises, à part le général De Gaulle et G. Pompidou ! Combien de présidents algériens se sont rendus en visite officielle en France ? Seulement deux (C. Bendjedid et A. Bouteflika) et la visite de A. Tebboune, actée mais non fixée et toujours suspendue, ne risque certainement de ne pas se dérouler cette année !
Il est donc peu dire que la France officielle accorde aux relations avec l’Algérie, une importance inégalée par rapport aux autres pays d’Afrique. Dès lors, il faut s’interroger sur la décision de la reconnaissance de la « marocanité » du Sahara occidental par E. Macron, sur les contreparties attendues par l’un et l’autre des pays, ainsi que sur les conséquences dans les équilibres précaires dans la région ?
La réponse peut transpirer des déclarations, de plus en plus fréquentes, d’un ancien ambassadeur (à la retraite) de France en Algérie (à deux reprises), en mission commandée. En effet, ce dernier a écrit un livre (l’énigme algérienne) dans lequel il déclare que « les relations franco-algériennes relèvent à la fois de la politique intérieure et extérieure de la France » … La messe est dite ! Celui qui a inauguré la « diplomatie des visas » (réduction drastique du nombre de visas), ajoute « qu’il faut créer un rapport de force avec l’Algérie, seul langage que ce pays comprend ». Enfin, la cerise sur le gâteau, il prône le « rééquilibrage » des relations entre la France et les deux pays, « en faveur du Maroc » !
X. Driencourt ne fait pas dans le détail, puisqu’il accuse notre pays de ne pas avoir « rendu l’ascenseur » aux multiples gestes faits par E. Macron en direction de l’Algérie et notamment ceux mémoriels, sans toutefois en définir le contenu.
Toute la question réside dans quoi mettre dans l’ascenseur pour satisfaire les désidératas de la France ? S’agit-il de problèmes commerciaux (achat de céréales, de poudre de lait, de véhicules automobiles, industries …), de défense et de sécurité (facilités dans la région sahélo-sahélienne, achat d’armement français…), de culture (promotion de la culture et de la langue française), de politique migratoire (retenue des africains migrants vers la France) ? Dans tous ces dossiers, notre pays a réaffirmé sa volonté de mener une politique indépendante qui exclut tous diktats d’où qu’ils viennent !
Qu’attend la France du Maroc ?
La reconnaissance, par la France, de la « marocanité » du Sahara occidental devrait se traduire par un « retour d’ascenseur » de la part du Maroc. Dans quel domaine ? Au niveau de l’armement, le Maroc a passé commande pour l’achat de F-16 américains et de chars Abrams. Au niveau industriel, le Maroc abrite déjà la plus grande usine Renault à Tanger, sans que la demande nationale n’arrive à consommer autant de véhicules. Pour le reste, la balance commerciale marocaine enregistre un déficit vis-à-vis de la France et ce pays a la dette extérieure la plus importante d’Afrique. Reste le volet politico-diplomatique, à cet endroit également, le Maroc est aligné sur les thèses américaines et israéliennes dans la plupart des dossiers internationaux. Les prochains mois nous révèleront, peut-être, les contreparties réelles de la décision française. En attendant, les relations algéro-françaises sont encore une fois dans l’impasse, ce qui se traduira certainement par des crispations multiples et diverses mais à cet endroit, les deux pays en ont l’habitude.
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