1.-Histoire de l’économie pétrolière et l’évolution erratique du cours du pétrole
L’histoire de l’économie pétrolière montre que les deux facteurs déterminants du cours des hydrocarbures sont les fluctuations de la croissance de l’économie mondiale, surtout la croissance de la Chine, un des plus grands importateurs d’hydrocarbures, accessoirement de l’Inde et les facteurs géostratégiques comme les tensions en Ukraine et récemment au Moyen-Orient imprévisibles. C’est que les gisements, très inégalement répartis, environ 60% sont localisés au Moyen-Orient, représentant avec respectivement : l’Arabie saoudite 266,57 milliards de barils, l’Iran 157,53, l’Irak 143,09, le Koweït 101, 50 et les Émiratis 97,80 milliards de barils. Selon les données internationales, toute déstabilisation de cette région aurait donc des impacts sur le cours des hydrocarbures notamment, toutes représailles contre l’Iran, outre l’embrasement de toute la région, sur le plan politique, sur le plan économique , aurait un impact sur le cours des hydrocarbures , l’Iran étant le 3eme réservoir mondial en pétrole, le deuxième réservoir mondial de gaz naturel (avec 35.000 milliards de mètres cubes gazeux, juste après la Russie 45.000 et avant le Qatar 20.000, ). La république islamique contrôlant, le détroit d’Ormuz où transitent 17 millions de barils par jour. De 1971 à 2023, montre d’importantes fluctuations avec de pics variant de 25 à 100%. Ainsi en 1971, nous avons un cours bas, puis une hausse en 1973, un cours bas en 1978, une hausse en 1980, une relative stabilisation entre 1990 et 1997, une nouvelle hausse en 2001, une baisse en 2005, un cours bas en 2008, haut en 2009 puis en 2015, cours bas en 2020 et, depuis 2022, un cours en hausse. De 1860 à 1940, les prix du baril ont oscillé selon les évènements mondiaux, grimpant pendant la première guerre mondiale, baissant durant la crise de 1929. Entre 1948 et 1970, ils sont restés relativement stables et bas, avant d’entrer dans une série de crises, appelées « « « chocs pétroliers ». Le premier choc pétrolier a débuté en 1971 avec l’abandon du système financier international issu des accords de Bretton Woods quand le président Nixon décréta l’inconvertibilité du dollar vis-à-vis de l’or. Le mouvement s’accentua lors de la guerre du Kippour lorsque les États producteurs, notamment ceux membres de l’OPEP, avaient décrété un embargo contre les pays soutenant Israël. Le second choc pétrolier fait suite à la révolution iranienne en 1978, puis à la guerre Iran-Irak en 1980. Le troisième choc pétrolier se situe en 2003, poussé par la demande croissante des nouvelles économies (Chine, Inde, Brésil…) .
Le quatrième choc pétrolier a débuté au premier semestre 2008 avec la crise économique mondiale, où le cours du Brent est passé de 96 dollars le 2 janvier 2008 à 144 dollars le 3 juillet 2008. À partir de 2009, les pays producteurs ayant réduit leur production pour maintenir leur niveau de revenus, le baril qui avait baissé de façon spectaculaire est progressivement remonté à 80 dollars. En 2010, la reprise économique s’est accompagnée de la plus forte croissance ayant contribué à relancer le prix à la hausse. Entre janvier et février 2011, avec les révolutions dans le monde arabe, les marchés craignant des répercussions en termes de capacités de production, le prix du Brent a atteint un nouveau pic le 13 mars 2012, à 128 dollars, puis à un niveau supérieur à 100 dollars en 2013. À l’été 2014, les cours s’effondrent, en dessous de la barre des 50 dollars, la cause principale étant un excès d’offre, alimenté par la production de pétrole de schiste aux États-Unis, et cela même si la consommation mondiale continue de croître. En 2016, les cours remontent à 50 dollars le Brent du fait des actions de l’OPEP + dont les deux grands producteurs, la Russie et l’Arabie Saoudite. Avec la pandémie du virus Covid-19 le prix du Brent est tombé d’un niveau de 50 dollars à moins de 20 dollars avant de remonter en juin 2020, à 40-45 dollars. La demande de pétrole augmente vigoureusement en 2021, en raison de la levée progressive des restrictions de déplacement et de la forte reprise économique mondiale. Tirant les prix du pétrole à la hausse, à 71 $ en moyenne en 2021, contre 42 $ en 2020. Avec la guerre en Ukraine, en 2022, les cours du pétrole ont repris leur hausse, le WTI américain dépassant les 115 dollars le baril, et le Brent frôlant 120 dollars, dopés par les incertitudes sur l’approvisionnement en or noir notamment de la Russie. Depuis début octobre 2023, les marchés redoutant une escalade de la situation géopolitique au Moyen Orient , après avoir connu un pic de plus de 93 dollars le Brent au lendemain des tensions , le cours du pétrole a connu d’importantes fluctuations. Il a été est coté le 23 octobre 2023, à 91,78 dollars le Brent (86,51 euros) et 87,55 dollars le Wit ( 82,52 euros), avec une nette baisse , le 08 décembre 2023 étant coté malgré les dernières décisions lors de la réunion de l’OPEP. Les bourses n’anticipant pas une extension du conflit avec de surcroît une économie mondiale morose, il est coté le 08 décembre 2023 12 h GMT à 75,28 dollars le Brent ( 69,80 euros) et 70,44 dollars le Wit (65,31 euros). Pour le gaz naturel, les prix ont bondi, après l’annonce de la fermeture d’un champ gazier en Israël , ayant été coté le 17 octobre 2023 à 53,205 euros le mégawattheure, en hausse de 30% par rapport à la période du 06 juin 2023, mais étant en nette baisse depuis le début novembre 2023, étant coté le 05/12/2023 à 39.397€/MWh, le prix du MWh, la raison essentielle étant la reconstitution des stocks à un niveau élevé. A titre d’exemple le prix du MWh de gaz en France sur le marché PEG est de 37.67 €/MWh pour le contrat Février 2024, alors qu’il s’élevait à 48.795 €/MWh le 09/11/2023 pour le même contrat futur.
2.-Les sept déterminants du cours du pétrole
Il s’ensuit que nous avons sept facteurs interdépendants qui fixent le cours du pétrole. Le premier facteur qui détermine le prix du pétrole est la croissance de l’économie mondiale et les tensions géostratégiques. Aucun expert ne peut prévoir au-delà de 2025 du fait d’importantes nouvelles mutations du modèle de consommation énergétique où les les trois locomotives de l’économie mondiale, à savoir la Chine (20% du PIB mondial et 72% du total du PIB des BRICS ) , l’Europe et les USA 40% du PIB mondial) soit au total 60% du PIB mondial. La demande mondiale de pétrole estimée par l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a été à 101,17 millions de barils par jour en 2022 contre 99,76 pour 2019 ,97,6 en 2021, avec une prévision dépassant 103 millions de barils jour en 2023 Le deuxième facteur, est l’action de l’OPEP+ qui regroupe 23 pays dont 13 membres de l’OPEP qui sont par ordre décroissant de production de pétrole: Arabie Saoudite, Irak, Émirats arabes unis, Iran, Koweït, Nigeria, Libye, Algérie, Angola, Venezuela, République du Congo, Gabon et la Guinée équatoriale. Les dix autres pays dans le cadre de l’OPEP+ sont la Russie, le Mexique, le Kazakhstan, Oman, Azerbaïdjan, la Malaisie, le Bahreïn, Brunei, le Soudan et le Soudan du Sud. L’OPEP+ avec la Russie représentent plus de 50% de la production mondiale, et sans la Russie environ 35%. Rappelons que trois pays ne sont pas soumis aux quotas , le Venezuela, la Libye et l’Iran. Le troisième facteur, les sanctions contre la Russie par l’OTAN ont fait que le prix du pétrole est cédé à un prix plus bas que celui du marché notamment vers la Chine et l’Inde ce qui accentue la baisse sur les prix . Le quatrième facteur, du côté de l’offre, nous assistons à une hausse plus rapide que prévue de la production de pétrole (non conventionnel) des USA qui a bouleversé toute la carte énergétique mondiale, étant devenue le plus grand producteur au monde avec plus de 13 millions de barils/j depuis septembre 2023 avant l’Arabie Saoudite et la Russie ( 10 millions de barils/j avec les réductions au sein de l’OPEP+). Les gisements de pétrole et gaz de schistes moyens américains affichent une rentabilité de 60 dollars pour les petits gisements, 40 dollars pour les gisements moyens et 30 dollars pour les grands gisements. Le cinquième facteur , en plus de l’important gisement qui est entré en production au Kazazthan, fin 2016, l’entrée de nouveaux producteurs, les nouvelles découvertes dans le monde en offshore, notamment en Méditerranée orientale (20.000 milliards de mètres cubes gazeux expliquant en partie les tensions au niveau de cette région) ainsi qu’ en Océan Arctique qui contiendrait 13 % du pétrole et 30 % du gaz naturel au niveau mondial, donc de futures tensions géostratégique à prévoir au niveau de cet espace, et en Afrique, dont le Mozambique, (plus de 4500 milliards de mètres cubes gazeux) qui pourrait être le troisième réservoir d’or noir en Afrique. Le sixième facteur est l’évolution des cotations des monnaies notamment du dollar et de l’euro . Le septième facteur déterminant entre 2025/2030 est le nouveau modèle de consommation énergétique mondial
qui aura un impact sur les prix actuels où il est prévu sur les 30 prochaines années 4.000 milliards de dollars par an d’investissement dans les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique, avec une prévision de réduction de /40/50% de la consommation des énergies fossiles, surtout le pétrole, et à un degré moindre le gaz moins polluant à l’horizon 2030, l’énergie de l’avenir horizon 2030/2040 étant l’hydrogène où la recherche développement connaît un réel essor.. Car si les Chinois, les Indiens et les Africains avaient le même modèle de consommation énergétique que l’Europe/USA , il faudrait cinq fois la planète, d’où l’urgence d’une transition énergétique maîtrisée.
En conclusion, D’une manière générale, en raison tant d’évènements géostratégiques que des nouvelles mutations énergétiques mondiaux, le cours du pétrole entre 2025/2030/2040, dépendra des de rapports de force entre les lobbys pétroliers et une grande fraction de la société civile mondiale et de gouvernants attentifs aux impacts négatifs du réchauffement climatique auquel l’humanité sera confrontée.
Dr Abderrahmane MEBTOUL
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