Le procès du journaliste qui devait avoir lieu le 29 juin dernier, a été reporté au mois de juillet. En détention depuis le 22 mai 2020, le journaliste marocain se prive de nourriture depuis plus de 85 jours, pour demander à comparaître en liberté devant ses juges.
« A ce stade, le corps ne répond plus normalement. Il a bien heureusement accepté de se nourrir d’un peu de miel et de dattes. Il semble qu’il était cette fois disposé à se présenter à l’audience face à son accusateur. Mais il n’a pas été conduit au tribunal. Ses avocats sont offusqués », rapporte Anthony Bellanger, secrétaire général de la Fédération internationale des journalistes (FIJ), cité par l’Humanité.
« C’est actuellement l’administration pénitentiaire et l’autorité judiciaire qui décident si Soulaiman Raïssouni est en mesure de se présenter au tribunal, sans tenir compte de l’avis médical et des souhaits de l’intéressé », disent ses proches.
Soulaiman Raïssouni comparaissait en première instance devant la cour d’appel de Casablanca en charge des affaires criminelles, accusé d’ »attentat à la pudeur avec violence et séquestration ».
En théorie, il devrait pouvoir se défendre au grand jour, et ses avocats opposer des arguments, citer des témoins, travailler sereinement à prouver son innocence. La réalité est tout autre, rappelle la même source. Ses quatorze demandes de remise en liberté ont été refusées.
Tout comme son confrère le journaliste et militant des droits de l’Homme Omar Radi, accusé, lui, de? »viol », Soulaiman Raïssouni est confronté à une machine judiciaire infernale qui broie sans attendre leur liberté, dénonce le journal.
« Tous deux purgent des peines préventives à la durée incertaine, prolongées au fil de comparutions expéditives. Ils sont quasiment condamnés avant même d’être jugés », a-t-on ajouté. Leur comité de soutien dénonce les « actes d’accusation montés de toutes pièces, le refus de présenter les témoins de la défense, l’absence des plaignants ». Les avocats d’Omar Radi demandent une expertise médicale de la plaignante. Ils réclament tous les témoignages des personnes citées dans les procès-verbaux, en vain. Son défenseur, Christophe Marchand, a été interdit d’entrée au Maroc le jour de l’audience de son client, mardi 29 juin.
« Omar Radi est malade, Soulaiman Raïssouni est en grave danger. (…) Si l’irrémédiable devait arriver, cela entacherait l’image du Maroc », estime Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières. « Je suis assez inquiet pour l’avenir », confie Anthony Bellanger.
Selon un média marocain, l’épouse de Raissouni, Kholoud Mokhtari a récemment posté sur les médias sociaux un linceul blanc qui lui était destiné. Elle a déclaré à l’agence de presse AFP que la dernière fois qu’elle l’a vu, son mari ne pouvait même pas se tenir debout ou tenir une conversation : « Il ressemblait à un cadavre ».
La FIJ a dénoncé les délais excessifs de la justice marocaine dans les affaires des journalistes Soulaiman Raissouni et Omar Radi, et appelé à un procès « juste et équitable ».
Les 29 et 30 juin dernier, durant 20 heures d’entretiens, la FIJ, représentée par son Secrétaire général, Anthony Bellanger, et Abdel Kebir Khchichne, le président du Conseil national du SNPM et Hanane Rihab, la vice-présidente du SNPM chargée des libertés, ont rencontré à Casablanca l’ensemble des parties impliquées dans les deux affaires, afin de bien appréhender les enjeux.
aps