Relations algéro-françaises : Encore des menaces !

La dernière trouvaille du ministre de l’Intérieur français, Bruno Retailleau, pour enflammer les relations algéro-françaises, c’est le fruitage, sur le journal l’Express, de la menace de divulguer une longue liste des avoirs (financiers et immobiliers) des « dignitaires » algériens en France !
Cette manière de procéder relève d’une pratique mafieuse puisqu’il s’agit d’un chantage à peine voilé, indigne d’un état de droit comme la France et soulève plusieurs questions de catégories différentes. La première est d’ordre judiciaire, parce que la rétention d’informations, relative à la corruption, est condamnable par la justice et le détenteur est considéré comme un receleur.
La seconde est d’ordre moral et éthique, puisque que ces informations sont détenues par un état et que cet état est signataire de toutes les conventions onusiennes relatives à la corruption. Enfin, la troisième est relative au timing de la menace qui correspond à un moment où les relations entre les deux pays sont au plus mal, parasitées par des déclarations et des actions hostiles contre l’Algérie.
La réponse à cette nouvelle menace ne s’est pas faite attendre, du côté algérien, puisque l’APS a tout simplement sommé les autorités françaises de publier cette liste et d’en révéler le contenu… Chiche ! L’Algérie rappelle opportunément qu’elle a réclamé l’extradition de plusieurs anciens responsables (51 commissions rogatoires) en fuite en France et la restitution des biens mal acquis dilapidés, en vain, les autorités judiciaires françaises les ont toutes rejetées.
Rocambolesque, parait l’épithète le plus approprié, pour décrire ce feuilleton, que d’aucun appelle déjà « l’affaire Boualem Sansal ». En effet, des mots comme pressions diplomatiques et consulaires, rappel d’ambassadeur pour consultation, rapport de force…, ont été employés, pour décrire cette « ingérence », une de plus, voire de trop !
L’ex-ambassadeur (à deux reprises), X. Driencourt avait écrit, dans son livre « l’énigme algérienne », que « les relations algéro-françaises relevées à la fois de la politique extérieure et intérieure de la France », constatation réciproque et que notre pays suivait avec une grande attention. Toutes les mesures et décisions françaises internes, prises en direction de notre communauté résidente en France, tout statut confondu (résidents légaux, illégaux, binationaux…).
Cette situation, de facto et de jure, tenait au fait, que la France a toujours considéré que le Maghreb et l’Afrique de l’Ouest, sont ses « profondeurs stratégiques captives » et en particulier pour le cas de l’Algérie. C’est le seul pays en Afrique à avoir été trois départements français, avant son indépendance !
À partir du moment où l’Algérie avait rejeté ce pacte colonial, pour des raisons historiques évidentes, deux profondeurs stratégiques vont s’affronter, au lieu de se mutualiser, chacun se considérant comme légitime et menant sa politique sans concertation avec l’autre.
Deux solutions se présentent à nous, soit la confrontation, soit la coopération. Malheureusement, la France a choisi la confrontation avec l’Algérie, dans la région, au nom de ses intérêts bien compris (économique, financier, minier et culturel…) en sabotant toutes les initiatives que notre pays entreprenait, pour consolider sa place de « pays pivot » dans la région.
C’est le cas pour le Mali où notre pays a joué de son influence, pour arriver aux « accords d’Alger » qui devaient mettre fin à la guerre civile entre le Nord et le Sud de ce pays. La décision de la France d’intervenir militairement (opération Barkhane), ne va pas régler le problème politique et le Mali va entrer dans une spirale de la guerre civile avec un risque majeur de partition du pays. Il aurait été plus constructif que la France apporte son influence pour consolider les « accords d’Alger » pour sortir la région sahélo-saharienne d’une dynamique de contagion.
Pour ce qui concerne l’Algérie, une première réunion, au sommet, avec les responsables des services de sécurité et de défense des deux pays, s’est tenue à Alger, afin de clarifier les positions car entre la confrontation et la mutualisation, il n’y a pas de place pour des positions ambiguës.
La première des clarifications est que la France reconnaît que les profondeurs stratégiques de notre pays sont légitimes et que la concertation et le dialogue doivent toujours être recherchés, plutôt que la mise en œuvre de décisions unilatérales qui ne tiennent compte que des intérêts de l’une des parties. Ceci a permis la visite officielle, sur invitation de son homologue français, le général d’armée Thierry Burkhard, du général d’armée Saïd Chengriha, chef d’état-major de l’ANP, le lundi 23 janvier 2023. Il a été reçu par le Président français E. Macron, auquel il a remis une lettre du Président A. Tebboune.
La coopération et les moyens de la consolider ont également été mis en avant, ainsi que l’examen des questions d’intérêts communs, dans la région et dans le monde. Le second point, qui a certainement été abordé, est la coopération militaire au sens large (formation, armement, renseignements, voies de passages…) où les deux pays ont des fenêtres de convergence et des intérêts communs à faire valoir. Ceci d’autant que notre pays a affiché, à plusieurs reprises, sa volonté de diversifier ses sources d’armement et d’équipements et la dernière visite du ministre d’État britannique, chargé des armées, le prouve, ainsi que les contrats militaires avec l’Italie (marine et hélicoptère), de manière à ne pas dépendre d’un seul pays et notamment la Russie.
Ce travail colossal d’efforts et de négociations devait être couronné par la visite d’état du Président A. Tebboune à Paris et c’est à ce moment précis qu’éclate « l’affaire Sansal» et de l’influenceur Doualmen qui ont été relayés par tous les médias français en boucle. La conclusion est facile à déduire, dès que les relations entre nos deux pays font des pas dans le rapprochement, des forces d’extrême-droite agissent sournoisement pour les cannibaliser.
La déclaration d’E. Macron qui date de deux ans est limpide, puisqu’il affirme « qu’il y a beaucoup de gens qui ont intérêt à ce que l’on fait depuis des années maintenant avec l’Algérie, n’aboutisse pas… et bien j’ai un message très simple, je vais continuer » non sans souligner « l’amitié et l’engagement du Président A. Tebboune pour aller de l’avant dans les relations entre les deux pays ». En fait, l’objectif de cette campagne était évident, il avait pour objectif l’annulation de la visite d’État, programmée il y a plus de deux ans à Paris.
Tous les prétendants, à cet enjeu crucial en France, sont en ordre de bataille pour l’élection présidentielle de 2027 et concentrent toutes leurs énergies avec leurs états-majors officiels et officieux, pour se lancer dans la bataille avec tous les moyens disponibles. Les précédentes élections présidentielles nous enseignent que la marge entre le vainqueur et le vaincu tourne autour de 1 à 2% des voix exprimées (sauf celle de J. Chirac et J.M. Le Pen). Un simple calcul rudimentaire nous permet d’évaluer qu’avec quelque 50 millions de votants potentiels, entre 3 à 4 millions de voix peuvent faire basculer l’élection présidentielle vers l’un ou l’autre des candidats arrivés au second tour !
Évalués entre 5 et 6 millions, les binationaux d’origine algérienne représentent, quelque 2 à 3 millions de votants potentiels à l’élection présidentielle de 2027, ce qui peut faire la différence et mener à la victoire le candidat qui pourra capter cet électorat ! C’est donc tout l’enjeu des prochaines élections présidentielles et celles à venir, ce qui explique, en partie, la politisation à outrance du dossier des flux migratoires et en particulier du cas spécifique des algériens et pas des autres.
Tous les états-majors politiques sont parfaitement conscients de cette réalité politico-démographique et de son impact sur les élections en général et celle présidentielle particulièrement. Certes, l’homogénéité du vote des binationaux n’est pas assurée et certains voteront pour la droite et même pour l’extrême-droit mais en général, comme pour toutes les minorités de par le monde, ces catégories votent pour des candidats porteurs d’idées de gauche.
En fait, il semblerait, que pour les élections de 2027, le candidat qui aura le plus de chance de l’emporter se situerait au centre droit, même s’il ne jouit pas d’un appareil politique (parti) solide et de ressources financières importantes. C’est donc dans ce contexte empoisonné que les relations algéro-françaises évoluent actuellement…
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