Par deux fois sur notre site et dans deux contributions (du 23 septembre 2023 et du 11 février 2024), j’avais attiré l’attention de l’opinion nationale et internationale sur la politique étrangère de l’Espagne au Maghreb, que j’avais qualifié de politique de « louvoiement » et à « géométrie variable », en fonction de ses seuls intérêts à court terme. Certes, « il n’y a pas d’amitié entre les peuples mais que des intérêts » comme disait un homme politique célèbre mais tout de même, il y a une règle d’or dans les relations internationales qui est la constance des positions et le respect des déclarations publiées, sinon le pays perd de sa crédibilité très difficilement rattrapable.
Ecart de langage entre P. Sanchez et José Manuel Albares.
Le chef du gouvernement espagnol Pedro Sanchez avait revu sa copie, lors de la 78ème de la session des Nations-Unies, du 20 septembre 2023, concernant le dossier du Sahara Occidental, déclarant que seule une solution, sous l’égide des résolutions de l’ONU est satisfaisante pour les deux parties, c’est-à-dire un référendum d’autodétermination du peuple sahraoui. Nous avions alors posé la question de savoir si parole de Pedro Sanchez était crédible, après qu’il ait reconnu, dernièrement, la « marocanité du Sahara occidentale » ? Il semblerait que lors de la préparation de la visite et du communiqué final qui sanctionne la visite, « l’Algérie aurait émis de sérieuses réserves quant aux positions ambiguës » du MAE espagnol sur le dossier sahraoui et cela, contrairement à la position de son chef de gouvernement qui a nettement évolué sur cette question !
Equilibrisme espagnol entre le Maroc et l’Algérie.
Il est clair que l’Espagne entretient des relations difficiles voire conflictuelles avec son voisin du Sud, dans divers dossiers brûlants, comme celui des enclaves de Ceuta et de Melilla, celui de l’émigration clandestine, celui du trafic de cannabis (le Maroc est le premier producteur au monde), enfin de sa responsabilité historique dans le dossier de Sahara occidental, comme puissance colonisatrice. Il faut signaler à cet endroit que le chantage du Makhzen exercé sur tous les gouvernements espagnols, a été une arme permanente. Cependant, l’Algérie n’a jamais exigé de l’Espagne qu’elle s’aligne sur ses thèses mais qu’elle soutienne les résolutions onusiennes sur le dossier, ce qui a d’ailleurs été le cas durant toutes les années antérieures. C’est donc la volteface espagnole qui a créé les conditions d’une rupture à vif entre les deux pays, ce qui a conduit à la suspension du traité d’amitié et au rappel les ambassadeurs des deux pays, d’autant plus que P. Sanchez a tenté en vain d’internationaliser le problème en demandant aux institutions européennes de lui venir en aide et notamment conformément à l’accord de libre-échange algéro-européen.
D’un autre côté, les relations commerciales algéro-espagnoles dans tous les secteurs, ont connu une intensification substantielle ces dernières années et notamment après la signature du contrat gazier qui unit notre pays et l’Espagne. Dès lors, la rupture brutale des relations commerciales, due à la volteface du Chef du gouvernement espagnol sur le dossier du Sahara occidental, a entraîné une réaction hostile des industriels et des commerçants espagnols qui ont dénoncé sa politique étrangère et ses conséquences catastrophiques sur l’économie de leur pays.
Une visite pour recoller les morceaux.
La visite de J. M. Albares, à Alger devait avoir pour objectif principal de convaincre les autorités algériennes que la position de l’Espagne sur le dossier du Sahara occidental ne variera pas de nouveau, au gré de l’évolution des relations hispano-marocaines très controversées. En outre, que cette page conflictuelle des relations hispano-algériennes, serait définitivement tournée mais certainement pas déchirée, car sans confiance, doublé de sa constance, dans la politique étrangère d’un pays, il est impossible de construire un partenariat stratégique durable.
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