L’Algérie vient officiellement de demander de rejoindre les pays du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), candidature qui sera sans aucun doute acceptée par ses pairs. Cette démarche n’est pas à séparer de la volonté algérienne de faire revivre le mouvement des non-alignés, bien au contraire. Pour rappel, ce mouvement est né dans les années 50 à 70, et avait le vent en poupe, puisqu’il représentait une alternative politique pour les pays en développement à l’alignement sur les deux blocs antagoniques nés de la guerre froide, née après la deuxième guerre mondiale. Le but de l’organisation, contenu dans la « déclaration de La Havane » de 1979, est d’assurer « l’indépendance nationale, la souveraineté, l’intégrité territoriale et la sécurité des pays non alignés et de promouvoir la solidarité entre les peuples du tiers monde ». La déclaration de Brion du 19 juillet 1956, proposée par Gamal Abdel Nasser, Josip Broz Tito, Soekarno et Jawaharlal Nehru, marque l’origine du mouvement, qui vise alors, à se protéger de l’influence des États-Unis et de l’URSS qui cherchaient à rallier tous les pays du monde à leur cause respective. Le terme de « non-alignement » a été inventé par le Premier ministre indien Nehru lors d’un discours en 1954 à Colombo. On peut considérer que la conférence de Bandung, tenue en 1955, qui a réuni une trentaine de pays d’Afrique et d’Asie, est une étape importante vers la constitution du mouvement des non-alignés.
Lors de la conférence d’Alger (5-9 septembre 1973), le mouvement initie un programme intitulé le « Nouvel ordre économique mondial » (NOEI), qui est adopté, par consensus, lors de l’Assemblée générale des Nations-Unies le 1er mai 1974. Elle a, par exemple, refusé de suivre les instances du consensus de Washington, lequel regroupe le Fonds monétaire international (FMI), l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et la Banque mondiale, considérant que ce serait nuisible aux intérêts des pays membres.
Le mouvement des non-alignés qui s’est développé dans les années 50, semble aujourd’hui, avec le conflit ukrainien, renaître de ses cendres avec une certaine acuité. En effet, les pays d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie, représentant l’écrasante majorité de la planète, vont s’abstenir de prendre une position franche, dans ce conflit entre « Blanc », en terre européenne, considérant qu’il y a un traitement discriminatoire de ce conflit, par rapport aux autres conflits dans le monde et notamment ceux Palestinien, de l’Irak, de la Syrie, du Yémen… Ce traitement en « deux poids, deux mesures », étant acté, une « majorité qualitative », dans ces trois continents, a refusé d’entrer dans les calculs étroits des USA, afin de s’aligner sur ses thèses, malgré les énormes pressions exercées sur eux. Cette situation donne au non alignement toute sa pertinence et sa crédibilité, dans la mesure où, les pays membres trouvent une « porte de sortie politique » en évitant l’unilatéralisme imposé par les USA et ses alliés occidentaux, qui exercent des représailles et des sanctions à peines voilées.
Mais entre temps, le conflit ukrainien va avoir des répercussions désastreuses sur l’économie mondiale et notamment pour les pays les plus pauvres, puisque les coûts de l’énergie, des engrais et des produits alimentaires vont s’envoler, ce qui incitent les pays du BRICS à s’organiser, pour défendre leurs intérêts économiques respectifs, sans devoir s’aligner sur les thèses de l’un ou de l’autre des protagonistes ! C’est à cet endroit que le mouvement des non-alignés et l’organisation des BRICS convergent dans un mouvement qui pour le premier est d’ordre politique et pour le second est d’ordre économique. Est-il possible d’envisager une parabole qui donnerait du sens à ces deux mouvements, pour imposer un retour au multilatéralisme dans la gestion des affaires internationales ? Toute la question est à cet endroit car il est évident que les USA ne vont pas accepter que cette force naissante impose ses idées et contrarie sa prépondérance politique et surtout économique. Sommes-nous en train de vivre les préludes d’une remise en cause des équilibres géopolitiques mondiaux, nés après la désagrégation de l’URSS et de la naissance, aux forceps, de la Russie ? Notre pays a tout intérêt à rejoindre les BRICS et à faire renaître le mouvement des non-alignés, de manière à peser un peu sur les décisions internationales en pleine mutation.
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