La violence faite aux femmes reste un fléau alarmant en Algérie. Le Réseau Wassila, une organisation pionnière dans l’accompagnement des victimes, se bat chaque jour contre ce phénomène tragique. Dalila Iamarene Djerbal, présidente de l’association, revient sur les défis, les solutions proposées et l’importance d’une prise de conscience collective face à cette problématique.
Vous avez récemment alerté sur la situation alarmante de la violence conjugale en Algérie. Quels sont les principaux défis que vous rencontrez dans la lutte contre ce phénomène?
Les défis sont multiples, mais le plus important reste le manque de soutien financier. Notre organisation, comme beaucoup d’autres, fonctionne principalement grâce aux dons privés, ce qui limite considérablement nos actions. Nous devons constamment chercher des fonds pour financer nos programmes, notamment ceux d’accompagnement juridique et psychologique. Le manque de financement rend difficile la mise en place de campagnes de sensibilisation, pourtant cruciales pour sensibiliser le public, surtout dans les régions rurales. Par ailleurs, la persistance de la culture patriarcale dans certaines régions complique encore davantage la tâche, car de nombreuses femmes restent en silence par peur ou méconnaissance de leurs droits.
La loi 15-19 de 2015 criminalise la violence faite aux femmes, mais son application reste insuffisante. Que manque-t-il concrètement ?
Bien que la loi soit un pas en avant, elle reste insuffisante tant sur le plan de l’application que de la protection des victimes. Le principal obstacle, c’est l’absence de preuves matérielles dans de nombreux cas. Les femmes se retrouvent souvent dans une situation de grande vulnérabilité, incapables de prouver la violence qu’elles subissent. En outre, même quand elles réussissent à obtenir une protection juridique, elles se retrouvent confrontées à un système judiciaire lent et parfois influencé par des stéréotypes sexistes. Cela crée un véritable sentiment d’impuissance chez les victimes.
Comment le Réseau Wassila parvient-il à sensibiliser les femmes, notamment celles des zones rurales, qui sont souvent les plus vulnérables ?
Nous avons développé une stratégie qui combine l’écoute et la sensibilisation, notamment à travers les réseaux sociaux. Bien que ces outils numériques soient précieux, ils ne suffisent pas. Le fossé numérique existe encore, particulièrement dans les zones rurales, où l’accès à Internet reste limité. C’est pourquoi nous avons aussi recours à des flyers et des campagnes locales pour toucher un public plus large. Cependant, la grande difficulté demeure le manque de financement pour étendre nos actions de sensibilisation à une échelle plus large. Nous avons des bénévoles dévoués qui nous aident à diffuser des informations et à accompagner les victimes, mais nos moyens restent très limités.
Les mentalités semblent parfois être un frein à l’évolution de la situation. Selon vous, quel rôle jouent les médias dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes ?
Les médias ont un rôle central à jouer, mais, malheureusement, beaucoup d’entre eux perpétuent encore des stéréotypes. Toutefois, il y a un progrès notable dans la couverture de ce problème, notamment sur les plateformes numériques. Les médias doivent se faire les porte-paroles des victimes et pousser à une véritable prise de conscience sociale. C’est un travail de longue haleine, mais nous sommes optimistes : de plus en plus de femmes osent parler et de plus en plus de gens s’engagent pour défendre leurs droits.
Le Réseau Wassila propose un accompagnement complet aux victimes de violence. Quels sont les services spécifiques que vous offrez à ces femmes ?
L’évolution des mentalités est lente mais nécessaire. Il est impératif de comprendre la spécificité de la violence conjugale et d’éviter de tomber dans des jugements patriarcaux. Trop souvent, la victime est perçue comme responsable de sa situation. Un vrai changement passe par une réforme des mentalités dans les institutions judiciaires et une meilleure formation des acteurs du système judiciaire. Si ce changement ne se produit pas, il est difficile d’espérer une véritable protection des victimes.
Quelles sont les actions urgentes que vous souhaitez mettre en place dans les prochaines années ?
Il y a beaucoup à faire, et nos priorités sont claires. Il faut d’abord garantir une meilleure application des lois existantes, notamment la loi 15-19. Nous plaidons pour l’abolition de la « clause du pardon », qui permet aux agresseurs de revenir sur leurs actes. Par ailleurs, il est urgent de créer des centres d’accueil pour les victimes dans chaque wilaya, afin de leur offrir un refuge sécurisé. Enfin, la prévention, par l’éducation dès le plus jeune âge à l’égalité des sexes, est essentielle pour prévenir les violences futures.
Un dernier mot sur l’espoir de changement ?
Bien que la route soit encore semée d’embûches, il y a de l’espoir. De plus en plus de femmes osent dénoncer et de plus en plus de personnes, qu’elles soient militantes, membres d’associations ou simples citoyens, s’engagent pour un monde sans violence. Ce mouvement prend de l’ampleur, et c’est en unissant nos forces que nous pourrons briser le silence et mettre fin à cette violence systémique. Le changement est possible, mais il nécessite la solidarité de toute la société.
Conclusion : Un combat nécessaire
La lutte contre la violence faite aux femmes en Algérie reste un défi de taille, mais elle est loin d’être une cause perdue. Grâce à des associations comme le Réseau Wassila, les voix des victimes se font entendre, et des solutions concrètes sont mises en place pour leur venir en aide. Cependant, pour que le changement soit véritablement effectif, il est indispensable d’installer une véritable culture de l’égalité et du respect au sein de la société et des institutions. C’est un combat qui doit être porté par toute la communauté, à tous les niveaux. Il est de notre responsabilité collective de faire en sorte que chaque femme puisse vivre dans un environnement sûr et respectueux.
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