A chaque intervention publique du ministre du commerce, la même erreur de ciblage se reproduit, avec un abcès de fixation pour le mois du Ramadhan, comme si le reste de l’année n’existe pas. C’est ainsi que le ministre du Commerce et de la Promotion des exportations, Tayeb Zitouni a affirmé, lundi à Alger, « la mise en place des mesures nécessaires pour assurer l’approvisionnement du marché national en produits agricoles, de manière régulière durant le mois de Ramadhan », à l’occasion d’une rencontre avec les gestionnaires des marchés de gros, et les associations de consommateurs, à la Safex.
Identification des spéculateurs et les moyens de les neutraliser.
Dans un récent article, que j’avais intitulé « Bon diagnostic mauvaise décision », j’avais souligné que les décisions du ministre du commerce ne se soldaient pas par une régulation des marchés des produits de large consommation. A quoi est due cette situation ? En effet, la situation anarchique du secteur du commerce et que le système de la distribution, pèse de plus en plus sur le pouvoir d’achat des populations vulnérables. Toutes les mesures prises pour lutter contre l’accélération des prix ont été vaines, comme celles d’importer de la viande bovine et la céder à 1.200 DA le kilo (oubliant qu’il n’avait qu’un petit réseau de distribution) ou celles qui consistent à multiplier les contrôles et à distribuer des sanctions pénales lourdes. Les prix de l’oignon, de la pomme de terre et de la banane ou les pénuries du lait, de la semoule et de l’ail, ont ravi la vedette et les médias intérieurs et extérieurs, ont souligné l’incapacité des pouvoirs publics à trouver des solutions durables pour réguler le marché
Instruments économiques contre instruments pénaux.
Pire encore, durant le mois de Ramadan, où une « forte consommation irrationnelle », engendre une situation spéculative effrénée et finissent par s’annuler. En d’autres termes, il faut mettre fin au bricolage ambiant, qui consiste à prendre des décisions ponctuelles et de circonstance (fêtes civiles et religieuses) et de s’attaquer au problème à la racine, c’est-à-dire, les causes réelles du dysfonctionnement que le ministre du commerce a identifié, à juste titre, en désignant le secteur de la distribution (gros, demi-gros et détail).
Pour un programme cohérent d’infrastructures et d’architecture commerciale.
Ce programme consiste à réaliser, de manière itérative, des infrastructures et des équipements modernes dans chaque wilaya, en fonction de la densité de la population et de sa vocation agricole et commerciale, permettant l’internalité de l’activité commerciale, au sein de ces infrastructures. Il faut donc organiser le commerce itinérant, dans chaque commune et gérer tout le système par la mixité (public et privé), en veillant à clairement définir (cahier des charge) les attributions de chaque intervenant, le secteur public pour le contrôle, les marges, la santé, la traçabilité et le secteur privé pour l’activité commerciale proprement dite. L’implication des collectivités locales (les communes et les directions de wilayas) dans le processus, est indispensable pour la bonne marche de l’opération, de manière à déterminer les assiettes de terrain devant servir à accueillir les emplacements de vente, à recouvrir les taxes locales, à veiller à l’hygiène et la sécurité et à proscrire le commerce informel.
Réviser le système de distribution.
La révision des droits et obligations de l’activité commerciale est d’une nécessité impérative même si elle va se heurter aux résistances objectives, de plusieurs années de laxisme à tous les niveaux. Le marché informel se nourrit d’une réglementation obsolète et engloutit des gains exponentiels avec un manque à gagner important pour le budget de l’état (2.600 milliards de DA selon la Directrice Générale des Impôts) et une saignée pour le consommateur qui se retrouve entre le « marteau et l’enclume ». Il faut rappeler que l’économie libérale (laisser faire, laisser aller), est celle la plus normative et les règles de la concurrence sont scrutées, dans tous les pays, avec une énorme attention, pour ne pas permettre la création de monopoles (La loi D’Amato aux USA). Or, il se trouve que notre pays a troqué le monopole public qui sévissait, aux monopoles privés, sans avoir, au préalable, défini « les règles du jeu », ce qui a permis aux monopoles privés de les définir lui-même et à son profit ! C’est tout l’enjeu politique du programme « Ramadan 2024 », que le ministre du commerce a développé dans son intervention, hier.
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