La comédie musicale, «Si Muhend U M’hend», a été présentée vendredi à Alger, restituant le parcours atypique du poète d’expression kabyle dont la verve, de colère et d’amour, étonnamment résiliente face à l’adversité, continue de résonner plus d’un siècle après sa mort.
Accueilli à l’Opéra d’Alger Boualem-Bessaih, le spectacle, écrit et mis en scène par Lyès Mokrab, a invité le public, relativement nombreux, à revisiter la vie tumultueuse de Si Muhend U M’hend, à travers une fusion artistique des plus concluantes qui a mêlé la parole et le verbe ciselés déclamés en Tamazight, aux airs mélodieux de Djamel Kaloun, célébrés par de belles chorégraphies signées Sara Bouzar. Durant près de deux heures de temps, l’assistance a pris part à un voyage onirique, à travers l’œuvre prolifique de Si Muhend U M’hend, «épicurien notoire», né vers 1850, et qui, bien que lettré, refusait de transcrire, voire répéter, ses poèmes après les avoir déclamés. Qui les entendra, les écrira», avait tranché le poète qui ne dérogera jamais à la règle qu’il s’était imposée. La conquête française de 1857 en Kabylie, l’assassinat de son père et de Yamina sa bien aimée, la dispersion de la famille, passant par la destruction de son village natal et de l’école où il étudiait, sont autant de bouleversements et de malheurs, restitués par l’auteur et metteur en scène, qui ont secoué l’enfance de l’aède durant la deuxième moitié du XIXe siècle, le poussant résolument à l’isolement et à l’errance. Ces drames accumulés détermineront sa personnalité d’iconoclaste et de rebelle, réfractaire à l’ordre établi. Se rendant compte de sa condition de déraciné, ne possédant plus rien, le jeune Muhend, écorché vif, réalise vite qu’un «destin de poète errant l’appelait». Maudit, il s’abandonne aux paradis artificiels, oscillant entre plaisirs et remords. La nostalgie de la terre natale, l’amour et l’amitié, le chagrin ou encore l’exil, autant de sujets évoqués par Si Muhend U M’hend, dans des Isefra (poèmes) à l’aphorisme tout aussi percutant, résultat d’une vision perspicace du poète sur son temps, sur les conditions d’existence des siens et l’avilissement de l’être humain soumis à un ordre impitoyable. A la fin de sa vie, l’eternel nomade, usé et affaibli par la solitude et le temps, n’aura de forces que pour aller solliciter, une dernière fois, les soins et la bénédiction du Cheikh Mohand Oulhocine, un sage aux pouvoirs de guérisseur des âmes, qui le maudira pour lui avoir refusé la reprise d’un poème élogieux qu’il avait pourtant déclamé à son endroit. Le poète aura bravé tous les interdits en ce bas monde qu’il quittera en 1905 à l’hôpital de Ain El Hammam, le cœur en peine et le visage délabré. Longtemps applaudis par l’assistance, les comédiens, Bilal Mohri et Rezki Ouali, (Si Muhend U Mhend /jeune et adulte), Malik Fellag, Hocine Ait Guenissaid, Massinissa Kaci, Melissa Sekhi (Yamina), Ania Iddir, Mounir Didani, Mohamed Lachemot, Yamina Abouahi, Dihia Smail et Rachel Ikheddachene, ont su porter la densité du texte, occupant tous les espaces de la scène. De même pour les danseurs et les ballerines, Maya Bachi, Melissa Benabdelaziz, Lamia Amrani, Nassim Merkal, Riad Hamdad et Meziane Tireche, qui ont brillé par la grâce du mouvement et la beauté du geste, dans des tableaux hautement esthétiques, servis par une quinzaine de compositions musicales aux tons narratif, événementiel, nostalgique, traditionnel, ou encore festif. Œuvres de Abdellah Kabiri et Ferhat Messaoui, la scénographie et le décor judicieusement minimalistes ont permis l’émergence du texte, dans un spectacle qui a restitué par l’anecdote et des faits marquants les liens intimes entre le poète et son peuple, qui firent de l’un le témoin des malheurs de l’autre et le pourfendeur de ses travers, tout autant que le héraut de ses espérances. Savourant tous les moments du spectacle musical dans la délectation, le public a interagi avec les comédiens et les danseurs par des salves d’applaudissements et des youyous nourris. La comédie musicale, «Si Muhend U M’hend» a été produite, par le Théâtre régional Kateb-Yacine de Tizi-Ouzou, en collaboration avec l’Opéra d’Alger, sous l’égide du ministère de la Culture et des Arts.
(APS)
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